La start-up OPTIPUS-PV produit des cellules photovoltaïques d’un nouveau genre. Constituées d’un matériau organique, celles-ci prennent la forme d’un film adhésif, souple et coloré, pouvant s’intégrer aisément à un appareil électronique sans altérer son design.
Peut-on utiliser l’énergie solaire pour alimenter des objets peu énergivores, sans détériorer leur aspect visuel ? C’était l’objet des travaux de recherche menés, dès 2012, par Jörg Ackermann, Olivier Margeat et David Duché, au sein de deux laboratoires – le Centre Interdisciplinaire de Nanoscience de Marseille (CINaM, CNRS/Aix-Marseille Université) et l’Institut Matériaux Microélectronique Nanoscience de Provence (IM2NP, CNRS/Aix-Marseille Université/Université de Toulon) –, et qui ont abouti au dépôt de trois brevets.
Afin de valoriser les résultats obtenus, les chercheurs se sont associés pour fonder la start-up OPTIPUS-PV, en décembre 2023, avec le soutien de CNRS Innovation et de la SATT Sud-Est. « Le CNRS a œuvré, dès le début, à la création de cette société, en nous encourageant à porter nos innovations au-delà des murs du laboratoire, vers le monde industriel », témoigne Jörg Ackermann, devenu CEO de l’entreprise. « CNRS Innovation nous a également aidés à mieux structurer notre projet et à trouver un quatrième associé à l’expertise complémentaire en matière de développement commercial et d’innovation : Benoit Bailliart. »
OPTIPUS-PV propose des films photovoltaïques – baptisés Energy Skin – adhésifs, souples, disponibles en une grande variété de couleurs et faciles à intégrer. Des qualités déterminantes, puisque l’entreprise vise, en premier lieu, à rendre autonomes en énergie des objets tels que des liseuses électroniques, des casques audio, ou encore des casques de vélo connectés.
Pour parvenir à un tel résultat, l’entreprise s’appuie sur les travaux de recherche de ses cofondateurs, autour de la technologie du photovoltaïque organique. « La plupart du temps, les cellules photovoltaïques sont essentiellement constituées de silicium », note Jörg Ackermann. « Si leur rendement est généralement satisfaisant, elles peuvent difficilement s’intégrer aux objets que nous ciblons, en raison de leur poids, de leur rigidité, de leur design… »
À l’inverse, les cellules photovoltaïques d’OPTIPUS-PV sont fabriquées sur un matériau souple, le PET, sur lequel des polymères organiques photoactifs sont déposés, donnant aux cellules quelques propriétés remarquables : elles sont légères, flexibles, recyclables et robustes mécaniquement. De plus, le recours à ces matériaux réduit la dépendance aux fournisseurs de silicium, majoritairement localisés en Chine.
En outre, Energy Skin se distingue par son design discret et ses multiples teintes, fruit d’une technique innovante de coloration. « En faisant varier l’épaisseur des fines couches à l’intérieur de notre film photovoltaïque, nous créons des phénomènes optiques d’interférence au sein du matériau, qui produisent de la couleur », explique Jörg Ackermann. « De cette façon, notre revêtement peut aisément se fondre dans un objet, en adoptant la forme et la nuance convenant parfaitement à son design. » Une méthode qui, de surcroît, affecte peu les performances du dispositif. « Notre technique entraîne des pertes de rendement de 10 à 15 %, bien inférieures à celles induites par les procédés de coloration des cellules en silicium, qui se situent entre 40 et 60 % », ajoute le CEO d’OPTIPUS-PV.
Si la start-up vise premièrement des objets consommant peu d’électricité, cette question de l’efficacité énergétique reste néanmoins cruciale. « Nous avons développé un procédé de fabrication innovant qui nous permet de nous approcher d’un rendement de 17 % en laboratoire et de viser entre 12 et 14 % en production, ce qui suffit à rendre autonomes de petits objets », annonce Jörg Ackermann. Si les cellules photovoltaïques en silicium restent supérieures dans ce domaine – avec un rendement pouvant atteindre jusqu’à 24 % –, elles ne peuvent toutefois pas répondre aux mêmes exigences qu’Energy Skin quant aux propriétés mécaniques et à l’esthétique.
Si l’entreprise prévoit, à terme, d’améliorer l’efficacité de sa solution, elle se focalise aujourd’hui sur son produit pouvant afficher un rendement de 12 à 14 %. Après avoir recruté deux ingénieurs et réalisé ses premiers POC (proofs of concept), la start-up cherche désormais à conclure une levée de fonds afin d’entamer la phase d’industrialisation et de commercialisation d’Energy Skin.
Concentrée sur cet objectif, l’équipe d’OPTIPUS-PV anticipe cependant déjà les futurs marchés auxquels la start-up entend s’adresser. En effet, en plus de rendre de petits objets autonomes en énergie, ses films photovoltaïques peuvent contribuer à augmenter le temps d’utilisation avant recharge d’équipements tels que des smartphones, des ordinateurs ou des tablettes. « De façon générale, nous souhaitons aussi démocratiser le recours au photovoltaïque organique, notamment dans la mobilité légère, par exemple en rendant autonomes les vélos-cargos », projette Jörg Ackermann. « Et à plus long terme, nous envisageons d’intégrer notre technologie à des avions, à des bateaux ou à des bâtiments classés. »
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